Anton Stolper
@AntonStolper
Wed Nov 25 18:55:24 +0000 2020

THREAD Il ne l’a jamais su, mais Diego a sauvé les vacances de deux jeunes Argentins à l’aéroport de Rome en 2016. Histoire que m’ont raconté ces deux jeunes Argentins sur le toit d’une auberge de jeunesse à Salerne dans la baie de Naples. #Maradona

C’est une nuit douce, on avait bu quelques bières, je suis assis avec Mateo et Jesús et on se raconte des histoires. Je n’ai jamais su quel âge ils avaient. J’avais 18 ans et des poils de fesses glorifiés sur les joues alors qu’eux avaient des buissons taillés sur la gueule.

Mateo aimait beaucoup l’alcool et un peu la beuh. Jesús aimait un peu l’alcool et beaucoup la beuh. Surtout la sienne. Il l’aimait à tel point qu’à chaque fois qu’il allait voyager, il prenait une quantité suffisante pour avoir des emmerdes s’il se faisait choper.

Pour ce voyage en Italie de deux mois avec son meilleur pote, il ne voulait prendre aucun risque pour tout gâcher bêtement. Il ne prendrait pas sa beuh comme d’habitude avec lui dans l’avion. Non, il en prendrait beaucoup plus afin d’être certain d’en avoir assez.

Sa technique pour ne pas se faire contrôler consistait à bien empaqueter sa beuh avant de la glisser dans son caleçon, « bien au chaud sous mes cojones ! » Et vu qu’il allait passer 13 heures assis dessus dans l’avion, il m’a assuré que l’empaquetage était « waterproof ».

Selon lui, l’odeur de la drogue serait masquée par… bon vous voyez. En théorie, les chiens des douanes ne devraient rien remarquer.

Les deux amis sont donc arrivés à l’aéroport, prêts pour l’aventure avec leurs sacs et la guitare de Jesús. Ils iraient à Rome, où ils loueraient une voiture et feraient le tour de l’Italie. Le vol commence plutôt bien. Jesús a les couilles qui grattent mais à part ça tranquille.

Mais elles grattent beaucoup, donc Jesús se gratte les couilles. Et là, une goutte de sueur froide dévale le long de son front avant d’aller se perdre dans sa barbe. Il ne sent pas la beuh, juste ses couilles.

Il vérifie sous son siège, réveille Mateo qui dormait déjà et revérifie sous ses couilles (les siennes, pas celles de Mateo). Mateo vérifie aussi (sous le siège, pas les couilles de Jesús). Mais non, la beuh n’est pas là.

Il faut savoir que tout ça il me le raconte sur le toit de l’auberge avec les mimiques pour accompagner son histoire. Je n’imagine pas ce qu’ont dû croire les voisins.

Jesús est désespéré. Ça avait quand même couté une blinde. Il se demande où il a bien pu le perdre. Et là, une deuxième goutte de sueur encore plus froide dégouline.

Quand ils avaient préparé leurs sacs, Jesús avait posé le sachet par inadvertance sur ses affaires dans sa valise et l’avait refermé dessus. Il est un peu rassuré, il n’a pas perdu sa beuh. Mais en même temps il est très stressé. La beuh est dans l’avion, pas sous ses couilles.

Il m’a expliqué qu’apparemment l’aéroport de Rome était connu pour ses chiens renifleurs de drogues qui étaient excellents et « des vrais bâtards » selon lui. Lui et Mateo ne dorment pas de la nuit.

Mais l’avion finit tout de même par atterrir. Les deux débarquent, toujours en train de transpirer, et se dirigent doucement vers la frontière. Ils essuient leurs fronts, montrent leurs passeports aux douaniers et passent sans problème.

Mais désormais, ce sont les sacs qu’il faut récupérer. Ils patientent un peu en voyant le manège tourner. Enfin, les deux sacs et la guitare arrivent. Les amis s’éloignent tout en guettant s’il y a des chiens.

Le hall des bagages est rempli, il y a du monde partout, ils osent espérer, mais quand ils s’approchent de la sortie, les deux Argentins repèrent ce qu’ils redoutaient. Des chiens. Mateo passe le premier, aucun problème, puis Jesús…

Dès qu’il passe devant, le vrai bâtard aboie comme un fou furieux. Il va recevoir le plus gros susucre de tous les temps. Jesús manque de s’écrouler. C’est foutu se dit-il, il va finir dans une prison romaine pour trafic de drogue international. Quelle cataschtroumpf.

Les trois policiers demandent évidemment à Jesús de les suivre pendant que le pauvre Mateo s’asseoit sur un banc dans le hall d’arrivées totalement désemparé. Ils emmènent Jesús dans une petite salle avec une table métallique au centre.

Ils lui demandent s’il a quelque chose dans sa valise qu’il voudrait déclarer ? Jesús, même s’il espère qu’il n’y a rien, se dit qu’il vaut mieux cracher le morceau. Il ouvre sa valise sur la table et aperçoit son paquet waterproof qu’il donne aux policiers.

Les policiers le regardent en ricanant avant de lui expliquer qu’ils allaient tout de même fouiller le reste de ses affaires au cas où il y aurait autre chose. Ils commencent par la guitare. Inspectent la housse ainsi que la caisse de résonance.

Satisfaits qu’il n’y ait rien, ils passent la guitare à Jesús et lui disent : « joue. » C’est vrai quoi, la vie est toujours plus belle avec de la musique. Jesús commence donc à jouer sa guitare, il a l’impression de jouer l’ode à son propre enterrement.

Les policiers s’attaquent désormais à la valise, ils en sortent une paire de chaussures, quelques caleçons, un jean, un short, un maillot de bain…et soudain, s’arrêtent.

Les trois se réunissent autour de la valise et la fixent. Jesús a arrêté de jouer. A en croire le visage des policiers, ils venaient de trouver quelque chose qui allait vraiment le mettre dans la mouise.

L’un des policiers soulève alors solennellement un objet de la valise. Jesús voit un morceau de tissu bleu vif. Puis émerge un nom et enfin un numéro. Maradona, 10. C’est une réplique du maillot de Napoli, ville où le joueur est adulé autant que Jesus (l’autre, pas le nôtre).

Les policiers se regardent d’un air grave. Puis des sourires émergent, celui avec le maillot rappelle à Jesús qu’il faut jouer de la musique. Et dès qu’il commence, ils se prennent dans les bras et commencent à danser en improvisant une chanson autour du nom sur le maillot.

Ces trois policiers à l’aéroport de Rome étaient des Napolitains, et donc, adulaient Diego Maradona. Ils terminent leurs tours, devant un Jesús totalement perdu, avant d’échanger deux trois plaisanteries tout en remettant toutes les affaires dans la valise.

Ils rendent la valise à Jesús en lui disant « Dai ! Va bene, vai ! ». Il n’en croit pas sa chance, il reprend sa valise, range sa guitare et part rapidement pendant que les policiers se marrent. Dans le hall d’arrivées il retrouve Mateo qui est au bout des nerfs.

Il lui dit de se dépêcher, qu’il lui expliquera tout après. Les deux amis foncent à la location de voiture, récupèrent les clés, trouvent la vieille Fiat et ouvrent le coffre pour y mettre les valises.

En soulevant la sienne, Jesús voit que les policiers n’ont pas refermé une poche à l’avant. Il met sa main dedans, touche une petite boule en plastique et regarde Matteo avec des grands yeux. C’était la beuh.

Sur le toit de l’auberge, je suis bouche bée, Mateo rigole en prenant une gorgé de sa bière, Jesús se rassoit en souriant. Il prend une taffe de son joint et dit : « quand je rentre en Argentine, je vais me faire tatouer le visage de Maradona sur le bras. » #Maradona

Wed Nov 25 19:09:44 +0000 2020