Jérôme Nicolle
@chiwawa_42
Wed Sep 02 17:25:47 +0000 2020

Bon, j'avais plutôt envie d'en faire un article qu'un thread, mais comme le sujet prends un peu de traction, il faut que j’explique quelques trucs. #5G #Thread… 1/38

J'aimerais revenir sur l'article de slate (https://t.co/0LfhMeq1Q2) et de voir à quel point il est biaisé. 2/38

Les détracteurs de la 5G ont l'habitude de relever deux points fallacieux que je dois vous expliquer sous un angle technique pour que vous puissiez bien évaluer leur pertinence. 3/38

1) La bande de fréquences L'un des aspects nouveaux de la 5G est l'utilisation de la bande de fréquence autour des 3,5GHz (en réalité entre 3,4 et 3,8GHz). Cette bande porte moins loin que les 800, 900, 1800, 1900, 2100 MHz utilisés en 2G/3G, 4/38

et des 700MHz et 2,6GHz utilisés en 4G. Si on ne déployait la 5G que sur cette bande de 3,5GHz, alors il faudrait multiplier le nombre de sites mobiles (pylônes) par 3 à 4, donc ça consommerait plus (d'où le chiffre avancé par ses détracteurs de *3,5 sur la conso). 5/38

Mais la 5G marche aussi très bien sur les fréquences actuellement utilisées, ce qui permet deux choses : 6/38

- Ne pas augmenter le nombre de sites pour la même couverture à la même consommation 7/38

- Ne pas remplacer le matériel analogique (antennes et amplis) actuels, pourvu qu'ils soient encore assez fiables en conditions environnementales parfois tendues. 8/38

Le fait de "refarmer", c'est à dire réemployer, les fréquences, est conditionnée par le renouvellement des terminaux pour qu'ils supportent les nouvelles modulations. On y reviendra. 9/38

Il y a aussi la question du 26GHz, qui permet à la 5G de faire des 'micro-cells" en zone très dense pour augmenter la bande passante globalement disponible. C'est notamment utile sur les lieux événementiels ou les gares. 10/38

Ceux-là seront marginaux et consomment très peu car les zones à couvrir requièrent des puissances très faibles, de l'ordre de celle d'un point d'accès WiFi. 11/38

D'ailleurs, on avait pas fait tout un flan du LTE-U apparu en 3GPP-R12 permettant d'utiliser les fréquences ISM du WiFi pour augmenter la bande passante de la 4G en zone dense… 12/38

2) La "mise en veille" des infras" la nuit 13/38

Il est un fait important et bien connu que les réseaux transportent beaucoup moins de données quand les gens dorment. C'est pas nouveau, c'est relativement simple à comprendre, on ne s'étalera pas sur le constat. 14/38

Par contre, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'un réseau consomme presque la même chose peu importe le débit d'informations transféré, simplement parce qu'il doit maintenir la modulation et son plan de contrôle (synchronisation logique entre éléments). 15/38

Un signal optique FTTH GPON ou Ethernet est modulé en NRZ (Non Return to Zero) : le laser clignote tout le temps, qu'il y aie des trames à transmettre ou pas. En radio, depuis la 4G (et même la 3G+, à partir du HSDPA / 3GPP-R3), on a d'autres astuces. 16/38

Pour augmenter les débits radio, les réseaux ont une technique de multiplexage en fréquences. Plusieurs canaux, sur des fréquences différentes, sont établis entre l'UE (User Endpoint / smartphone) et le eNodeB ou RRU (l'antenne). On appelle ça le MiMo. 17/38

Un canal consomme autant à être modulé et amplifié. Plus il y a de terminaux actifs sur une zone, plus ils se parasitent naturellement entre eux, affaiblissant le rapport signal-bruit, requérant de l'antenne une plus grande puissance et une plus grande sensibilité. 18/38

La 5G standardise ce qui existait déjà sur certains équipement 4G dont ceux utilisés par Orange (https://t.co/dhArOKurp9), … 19/38

C'est la variation de puissance et du nombre de canaux // allumés en même temps en fonction soit de l'heure (4G) ou de la charge réelle du réseau (5G). 20/38

En clair, le réseau n'est jamais éteint, il est juste ramené au minimum fonctionnel utile lorsque la charge ne justifie pas d'allumer des chaînes radio "MiMo" (Multiple Input - Multiple Output, comme en WiFi depuis le 802.11n). 21/38

Ce que le papier de Ericsson (https://t.co/1hmJeR0taU) dit c'est que cette astuce permet de réduire la consommation d'une "antenne" de 15 à 20% sans impacter en rien le service rendu. 22/38

Si on extrapolait ça à des déploiements 26GHz dans des centres d'affaires comme à La Défense, alors on serait plutôt de l'ordre de 50-60% d'économie. C'est ça, la promesse de la 5G. Plus d'usages possibles, moins de consommation. 23/38

Pour en profiter, il va falloir remplacer un paquet de machines, et ça a une empreinte environnementale. C'est là tout le problème : l'ACV des équipements réseaux et des terminaux n'a fait l'objet d'aucune étude sérieuse pour l'instant. 24/38

Donc la bonne réponse est : on ne sait pas si le "CAPEX" environnemental est compensé par la baisse de l'"OPEX" du même avec cette techno. 25/38

Est-ce vertueux ? Aucune idée. Par contre ce qui est certain, j'ai pas accès. Par contre on sait que la 5G apporte son lot d'optimisations techniques, environnementales et fonctionnelles, dont on serait idiot de se passer volontairement et sans bonne raison opposée. 26/38

Si vous voulez par contre taper sur les réseaux et le numérique, il y a un véritable enjeu que vous n'avez pas encore relevé : le dogme de la concurrence par les infrastructures. cc @ARCEP 27/38

@Arcep On a *pas* besoin de quatre opérateurs mobiles sur un territoire donné. C'est idiot car redondant. Un seul opérateur à l'inverse, ça le placerait en chemin critique des usages, et donc c'est dangereux. Donc le bon nombre d'opérateurs, c'est deux. Juste pour le mobile. 28/38

@Arcep Ce qu'il faudrait, c'est qu'il n'y aie que deux licences 5G mises aux enchères, et que les opérateurs soient contraints à se grouper pour les exploiter à des conditions correctement régulées. Là, on diviserai par presque deux la consommation du mobile en France. 29/38

@Arcep Ce avec un seul texte réglementaire. Et ça, c'est bien. 30/38

@Arcep Sur le fixe c'est différent. Le mobile a ceci de particulier que les morceaux "passifs" (le média, l'air, la fibre ou le cuivre en fixe) et l'"actif" (les antennes et RRU ) sont intrinsèquement plus liés car l'air est gratuit, alors que la fibre coûte cher à poser. 31/38

@Arcep Du coup, sur le réseau fixe, un seul réseau de fibre suffit, s'il est conduit entre des bâtiments mutualisés entre tous les opérateurs et chaque abonnés. 32/38

@Arcep Nul besoin de ces centaines de milliers d'armoires de rues fragiles et mal entretenues, il faut une boucle locale unique, comme on l'avait pour le cuivre, et conformément à l'article 9 du préambule de la Constitution de la 4ème république. 33/38

@Arcep Surtout quand le ministre parle de "service universel" à propos de la fibre. cc @cedric_o 34/38

@Arcep @cedric_o Faire passer ça, c'est nous épargner des dizaines de milliers de tonnes de PEHD (gaîne de câbles) et centaines de milliers de tonnes de CO2 (déplacement des intervenants sur le terrain, maintenance…) tout en ré-ouvrant le marché à la concurrence,… 35/38

@Arcep @cedric_o …puisque de nouveaux opérateurs pourraient se lancer, comme aux heures glorieuses du dégroupage (1998). 36/38

@Arcep @cedric_o Vous imaginez donc pourquoi le cartel actuel n'y est pas favorable. 37/38

@Arcep @cedric_o Bref. Si vous voulez parler de numérique et d'écologie, il y a des choses à dire. Mais se faire l'écho des sceptiques scientifiquement illettrés ne sert personne à mon avis. 38/38

@Arcep @cedric_o J'ai reformulé, enrichi et traduit de thread là, si vous voulez élargir le débat. https://t.co/ScVLGdGYDK

Wed Sep 09 16:06:55 +0000 2020