Olivier Tesquet

🚨 Après plus de 8 ans d’instruction, la justice rattrape les marchands de surveillance français qui font affaire avec des régimes autoritaires : quatre dirigeants d’Amesys et Nexa Technologies viennent d’être mis en examen pour "complicité de torture et disparitions forcées".👇

Rappel des faits : en 2011, plusieurs médias (@owni, @_reflets_ et le @WSJ) révèlent qu'une entreprise française, Amesys, a vendu en 2007 un vaste système d'interception des communications - Eagle - à la Libye de Kadhafi, avec l'aide de Nicolas Sarkozy. La @fidh_fr porte plainte.

L'affaire fait grand bruit, les autorités françaises promettent que ça n'arrivera plus, et après des mois d'atermoiements et de blocages du parquet, une information judiciaire est ouverte en janvier 2013. L'enquête est confiée au pôle crimes contre l'humanité du TGI de Paris.

Juillet 2017, bis repetita : je révèle dans @Telerama qu'Amesys, devenu Nexa, a vendu en 2014 le même logiciel, rebaptisé Cerebro, à l'Egypte du dictateur Sissi. Après une nouvelle plainte de la FIDH, une deuxième information judiciaire est ouverte.

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Ces nouveaux développements sont importants, alors qu'on pensait l'affaire empêtrée dans les sables mouvants du secret-défense : non seulement ils concernent les deux dossiers, mais la justice a décidé d'étendre l'enquête à l'Arabie Saoudite. La fin de l'impunité ?

Ces entreprises - il en existe d'autres - se sont toujours défendues en répétant qu'elles luttent contre le terrorisme et défendent les intérêts de la France à l'étranger. Elles oublient de dire qu'elles gagnent de l'argent en facilitant la violation des droits humains.

Comme l'écrit la FIDH, "les mises en examen des quatre dirigeants pourraient précéder celle des deux entreprises en tant que personnes morales". Ce serait une première, en attendant la décision de la Cour de cassation dans l'affaire Lafarge en Syrie (le 15 juillet).

Précision : 1 mise en examen concerne la Libye (Philippe Vannier pour complicité de torture), et il y en a 3 dans le volet égyptien (Stéphane Salies, Renaud Roques et Olivier Bohbot pour complicité de torture et disparitions forcées).

Hasard du calendrier : Jean Castex vient d’annoncer la création d’une commission parlementaire pour étudier les exportations d’armement. Celle-ci produira un rapport annuel sur les biens à double usage, « sujet ultra-sensible » depuis… l’affaire Amesys.

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On a le droit d’être dubitatif : il y a quelques mois, le SGDSN, qui dépend de Matignon, s’opposait dans une note classifiée à un renforcement du contrôle, qui « pourrait entraîner des effets d’éviction de l’industrie française dans certains pays ».

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Quant à moi, ça fait des années que j’essaie d’obtenir les délibérations de la commission interministérielle des biens à double usage (CIBDU) qui, sous l’égide de Bercy, décide à quels pays les entreprises françaises peuvent vendre. Le hic : c’est couvert par le secret-défense.

Dans Libé, @pierre_alonso raconte comment la justice a pu accélérer dans l'affaire Amesys/Nexa après des années d'atermoiements : une nouvelle juge d'instruction et une douzaine de gendarmes en renfort. Gardes à vue, perquisitions, mises en examen.

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🚨 C'est au tour d'Amesys d'être mis en examen en tant que personne morale pour "complicité d'actes de torture" après la vente de technologies de surveillance à la Libye de Kadhafi. Et ce n'est peut-être pas terminé... (AFP + sources proches du dossier)

Thu Jul 01 14:45:26 +0000 2021