Guillaume Nicoulaud

Poutine et ses sbires le répètent tous les jours et, comme nos « patriotes » tendent à répéter bêtement tout ce que disent Poutine et ses sbires, ils le répètent aussi : les Ukrainiens sont des « ukronazis » ! Un #Thread https://t.co/ecctDUm470

La tarte à la crème, c’est le régiment Azov ou, plutôt, le groupe paramilitaire de 300 gugusses qui a existé pendant 6 mois avant d’être intégré dans l’armée régulière en 2014 — soit un tout petit peu plus de 0.0007% de la population ukrainienne.

Plus sérieusement : la seule formation d’extrême droite qui ait un peu de poids en Ukraine, c’est Svoboda. Ils étaient d’ailleurs très amis avec Jean-Marie Le Pen (alors encore président du FN), avec qui ils avaient signé un « protocole d’accord » en 2009.
https://www.dailymotion.com/video/x1e8ikj

Leur plus gros score historique, c’était aux législatives de 2012 : Svoboda avait réussi à s’attirer 10.45% des suffrages — principalement parce qu’ils s’étaient lancé dans une stratégie de dédiabolisation (façon FN) depuis 2004.

Sauf que ça n’a pas duré : aux dernières législatives, celles de 2019, Svoboda s’est allié à cinq autres petites formations d’extrême droite (dont le 'Secteur droit' et le 'Corps national' du fondateur d’Azov) pour tenter de faire un score.

Ils ont fait 2.15%.

Ce qui, comparé aux 43.16% de ‘Serviteur du Peuple’ (Слуга народу), le parti de Volodymyr Zelenskyy, ne fait clairement pas grand-chose — genre 20 fois moins.

Bref, électoralement parlant, l’extrême droite ukrainienne ne pèse pratiquement rien.

« Ah ! Nous dirons les électeurs du parti qui signait un protocole d’accord avec Svoboda il n’y a même pas 13 ans, mais c’est Zelenskyy et ses amis les ukronazis qui massacrent les pauvres russophones ukrainiens ! »

Alors déjà, Zelenskyy est lui-même russophone. C’est d’ailleurs un des trucs qui a joué en sa faveur aux présidentielles de 2019 : c’est précisément dans les régions largement russophones qu’il a fait ses meilleurs scores au second tour. https://t.co/PPUdgty4QK

Mais surtout, même s’il est toujours resté discret sur la question, Volodymyr Zelensky est juif.

Pour un nazi, je me dois d'informer nos « patriotes » que ça pose un petit problème (recherchez le sens du mot ‘euphémisme’ dans un dictionnaire).

Quant à son parti, ce sont des centristes, un peu libéraux un peu sociaux-démocrates, affilé au niveau européen à l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (Alde) au même titre que Renaissance (ex-LREM) ou l’UDI.

Bref, les « ukronazis » ne sont ni nationalistes ni socialistes et encore moins national-socialistes. Ils ne sont même pas antisémites et n’ont jamais envahi personne.

Ils ont juste le tort de refuser de se laisser envahir par Poutine. Les vilains !

Lequel Poutine est, soit dit en passant, ouvertement nationaliste, largement socialiste, clairement impérialiste, certainement antisémite (et homophobe) et n’a manifestement rien d’autre à faire que d’envahir ses voisins en tuant tout le monde.

Le parallèle avec notre histoire est très drôle (ou navrant) : les « franconazis », selon nos patriotes, c’étaient donc de Gaulle et les résistants, appuyés par les forces « atlantistes », qui se battaient contre les gentils souverainistes du IIIe Reich. #Fin

Sun Oct 09 14:58:06 +0000 2022