Pierre Beyssac

Youtube trolle ici très intelligemment la récente loi française visant à protéger les mineurs du... porno. En mode "vous votez des conneries législatives, on les applique à la lettre". ⤵️ https://t.co/ezb5bRlX0h

L'article considéré, le voici. [l'article est modifié régulièrement, la dernière fois par une loi contre les violences animales, c'est difficile de s'y retrouver]. https://t.co/innMLXXsiu https://t.co/ytYce3pFBF

Donc la loi dispose que l'intermédiaire responsable d'une mise à disposition de contenu estimé préjudiciable aux mineurs (dont porno, violence) ne peut se contenter d'une simple déclaration par clic "je suis majeur".

Cette disposition visait explicitement les sites pornographiques, sur demande d'associations de "défense de la famille" [sic] etc. Le législateur ne s'est pas préoccupé de l'application technique, il a estimé que ce n'était pas son problème.

Le gouvernement pousse l'affaire car cela lui permet de développer le flicage en ligne, identité en ligne etc, toutes mesures visant à réduire l'anonymat/pseudonymat en ligne et à développer tout un écosystème + industrie de surveillance privé + public.

Les britanniques ont essayé de prendre des mesures similaires mais ont abandonné dès 2019 vu l'infaisabilité de donner une preuve de majorité pour l'accès au porno de manière non dangereuse en termes de fichage. Mais en France, on est bien plus forts pour aller droit dans le mur.

Petit souci (ou pas) : l'article 227-24 ne concerne pas que le porno, mais aussi d'autres types de contenus dont les contenus violents. Du coup, les mêmes responsabilités et mécanismes s'appliquent.

Donc Youtube n'est pas totalement infondé à bloquer l'accès aux mineurs à la vidéo de Zemmour : c'est la loi "visant à protéger les victimes de violences conjugales" qui l'y pousse très fortement. [oui on appelle ça un cavalier législatif]

Et quel est le moyen le plus évident pour une plateforme comme Youtube pour avoir une preuve de majorité ? Demander une pièce d'identité. C'est en droite ligne de ce que souhaitent à terme le gouvernement, la police et l'industrie de la sécurité pour nos accès Internet.

Donc un très beau pied dans la porte à différents titres, police, gouvernement, plateformes, pour collecter un maximum d'informations sensibles à notre égard et se les échanger tranquillement à nos dépens. Inutile de dire que Cédric O ne critique pas du tout le choix de Youtube.

C'est la souveraineté 3.0 : l'écosystème de surveillance plateformes + État (le second ayant besoin des premières, comme on l'a vu avec l'initiative du cloud souverain) qui se met en place sous nos yeux, sous les applaudissements des gens qui croient protéger les mineurs.

Et c'était bien évidemment non seulement prévisible mais visible bien en amont, bien avant la loi "visant à protéger les victimes de violences conjugales".

Cerise sur le gâteau, Youtube donc Google collecte ici de belles informations d'identité sur nous. Vous n'espériez tout de même pas qu'ils se priveraient de l'aubaine, même pour troller.

Addendum : l'article 227-24 a été amendé de multiples fois ces dernières années et complété par une procédure de recours via le CSA (qui permet au plaignant d'éviter des frais de justice). Du coup j'ai fait de gros raccourcis sur les origines des dispositions actuelles.

Mais c'est la dernière loi "violences conjugales" qui a remis ces dispositions au devant de l'actualité + un recours rejeté en octobre par des associations de "défense de la famille" contre un certain nombre de plateformes porno qui n'appliquent pas de vérification d'âge.

Fri Dec 03 13:13:44 +0000 2021