Maxime Vasse
@webdif
Wed Jul 08 11:11:00 +0000 2020

Il n'y a rien qui va dans cette tribune 😄
Thread ⬇️ https://t.co/ZAujH77pjm

1️⃣ Tout d'abord, une conception erronée du télétravail. Dans cette tribune, travail à distance = travail à domicile. Une méconnaissance des tiers-lieux qui biaise la réflexion, puisqu'on imagine que télétravail est synonyme de solitude physique.

Les tiers-lieux, coworkings, pépinières, permettent d'échanger avec d'autres travailleurs. On ne se limite plus à nos seuls collègues, on peut discuter avec les salariés d'autres entreprises. Cela permet de se créer un réseau, d'échanger des pratiques, de créer des synergies.

Les coworkings se démocratisent dans les grandes villes. Il y a surement quelque chose à faire au niveau de l'aménagement du territoire, pour les rendre accessibles y compris dans les plus petites agglos. L'idée de @gchampeau me paraît intéressante :
https://t.co/FEEHTjhX3Z

Enfin, les formes de télétravail sont très diverses, il faut se débarasser de la vision "seul chez soi". On peut imaginer du coworking ente voisins par exemple. Pour l'anecdote, ma femme est aussi ma collègue : c'est une forme toute particulière, le "coworking à la maison" 😅

2️⃣ Ensuite le point de vue présenté méconnaît les bonnes pratiques de communication et de collaboration en télétravail, avec un raccourci télétravail = pas de lien avec ses collègues. Pourtant, avec de bons process, il est tout aussi probable de discuter perso avec ses collègues.

On peut discuter de souffrances personnelles ou de santé. On discute aussi de séries ou de cuisine. Et ce avec des collègues aux âges, sexes, religions et conditions sociales différents. Une diversité même plus grande qu'en bureau, puisqu'on y ajoute la diversité géographique.

Le problème provient du raccourci : communication en télétravail = visioconférence. Alors que la palette d'outils pour réussir la mise en place du full remote est bien plus large. J'avais présenté les outils qu'on utilise chez @Oclock_io par ici :
https://t.co/MnYkz98Ydj

Via l'écrit, il est même certain qu'il y a davantage d'échanges entre collègues, y compris de services différents. Je partage l'amour pour la série The Ozark avec @flepasse alors que je n'ai jamais travaillé avec lui directement. L'engagement salarié est d'autant plus fort. https://t.co/84S5K1liKO

L'écrit permet aussi que chacun ait voix au chapitre. Il n'y a plus la grande gueule qui s'impose, la femme dont on coupe la parole par sexisme ordinaire. Sur Slack, le message du dirigeant cofondateur est au même niveau que celui de la nouvelle recrue qui est arrivée la veille.

3️⃣ Autre confusion qui a son importance, l'incapacité à séparer le télétravail du confinement avec le télétravail dans de bonnes conditions. Le travail à la maison improvisé, avec les enfants dans les parages, ça ne ressemble en rien au quotidien du télétravailleur.

La tribune met en avant le retour des femmes aux foyers, qui travaillent et s'occupent des enfants en même temps. Avec comme argument... le fait que ce soit les femmes qui se sont majoritairement arrêtées de travailler pendant le confinement. Ce n'est donc pas du télétravail ! 🤷‍♂️

Cette confusion "télétravail = travail à l'arrache" est l'un des poncifs les plus répandus, puisque beaucoup n'ont connu le travail à distance qu'à l'aune du confinement. Travailler sur un bout de table, sur un écran 11" avec un bébé dans les bras, ce n'est pas du télétravail 🙃

4️⃣ Enfin, la tribune termine en présentant le téletravail comme la fin du salariat. Toujours le même préjugé : loin des yeux loin du cœur. On ne pourrait intrinsèquement pas créer une relation durable en télétravail, on reposerait donc sur des freelances payés à la journée.

Le recours à un prestataire plutôt qu'à une embauche est intéressant quand un besoin est ponctuel et spécialisé. On peut aussi avoir envie de passer par des indépendants pour automatiser le développement commercial, ce qu'on appelle plus communément aujourd'hui l'ubérisation.

Ces considérations n'ont pas de rapport avec la méthode de travail. La livraison de repas n'est par exemple pas un business dématérialisé. C'est au contraire tout ce qu'il y a de plus physique, car on ne peut pas faxer une pizza. Les livreurs UberEat ne sont pas en télétravail !

Une entreprise qui a des besoins réguliers va privilégier des embauches classiques, car c'est bien plus facile de manager et de motiver un salarié qu'un indépendant. L'appartenance à l'entreprise, c'est un ingrédient important de productivité comme de qualité de vie au travail.

Surtout, le télétravail peut permettre au contraire davantage d'appartenance, et parfois davantage de salariat. Par exemple, alors que le plupart des formateurs d'organismes de formation sont indépendants, les profs de @Oclock_io sont presque exclusivement en CDI.

La centralisation du travail qu'apporte le numérique permet de regrouper les besoins de talents, et donc d'ouvrir des postes à temps plein plutôt que de recourir à plusieurs indépendants dans plusieurs villes comme c'est le cas de nos écoles consœurs.

📝 Pour résumer : télétravailler ce n'est pas travailler à la maison, tout seul, isolé, dans de mauvaises conditions, en indépendant. Ça n'aggrave pas les inégalités ou le mal-être. Cela reste un moyen, à nous de faire ce qu'il faut pour arriver à nos fins.

Bien évidemment, c'est bien normal pour une entreprise d'immobilier de bureau de faire une telle présentation du télétravail. On peut le voir comme une menace pour ce genre d'activité. Mais c'est aussi une opportunité. Développer des projets de tiers-lieux notamment.

Aussi, il est courant de sortir l'épouvantail d'une société entière en télétravail. Au-delà du fait que ce ne serait pas souhaitable, ce n'est de toute façon pas possible. Beaucoup d'activités ne peuvent pas être effectuées totalement à distance.

En revanche, au moment où l'on veut relancer l'économie, combattre le chômage qui galope pendant cette crise sanitaire, le télétravail est une opportunité incroyable, en rendant le travail accessibles en dehors des bassins d'emplois.

Maintenant que la 4G et la fibre sont présentes dans une grande partie du territoire, on peut revitaliser des zones rurales entières en permettant à leurs habitants de retrouver du travail ou de se former à distance.

Avec la numérisation des services administratifs ou encore via la télémédecine, on a l'opportunité de résoudre la dégradation ou l'éloignement des services publics pour ces populations.

A distance, pour plus de présence.
Vive le télétravail ! ❤️

Wed Jul 08 11:11:17 +0000 2020